Comment intéresser les nouvelles générations à l’histoire ? Le récit de notre épopée nationale ne dit pas grand-chose sur les racines de notre monde globalisé. Pas plus que les produits dérivés de l’histoire fabriqués par des industries culturelles : des jeux vidéo aux reconstructions historiques à grand spectacle, le passé recyclé donne rarement des clefs pour comprendre le présent. Quant aux diverses commémorations orchestrées ici ou là, elles privilégient trop souvent la scène nationale, sans apporter de réponses aux préoccupations d’aujourd’hui. Alors quelle histoire enseigner ? Comment construire une mémoire critique face à tous ces passés reconstruits selon les intérêts des uns et des autres, voire face à l’histoire virtuelle ?
« L’avenir est un miroir où se reflète le passé. » Serge Gruzinski se fait ici l’avocat d’une histoire qui permet de faire dialoguer le passé et le présent. Une histoire globale donc, qui décentre notre regard et se focalise sur une étape cruciale pour l’humanité : la Renaissance. Avec la conquête des océans, l’Europe découvre qu’il existe des mondes différents et prend ainsi conscience d’elle-même. Soudain, tout change d’échelle. Les horizons s’élargissent, des sociétés qui s’ignoraient entrent en contact, parfois au prix d’affrontements d’une extrême violence. Mais les hommes et les idées commencent à circuler, voire à se mêler, tandis que les premiers réseaux commerciaux se tissent autour du globe. Un immense bouleversement pour les contemporains dont l’histoire éclaire, par bien des situations concrètes, les mondes mêlés dans lesquels nous vivons.
Serge Gruzinski enseigne l’histoire en France, aux États-Unis et au Brésil. Ses derniers ouvrages sont La Pensée métisse (Fayard, Pluriel, 2012), Les Quatre Parties du monde (Points Seuil, 2006), Quelle heure est-il là-bas ? (Seuil, 2008), L’Aigle et le Dragon (Fayard, 2012).