Maison d'édition depuis 1857

NEWSLETTER

Des camps dans Paris

Austerlitz, Lévitan, Bassano (juillet 1943-août 1944)

Jean-Marc Dreyfus, Sarah Gensburger

Acheter votre format
Acheter30,00 €

L?existence de trois camps d?internement au coeur de Paris durant l?Occupation n?est ni connue ni reconnue. Il s?agit pourtant d?un épisode central de la persécution des Juifs de France, puisqu?il touche le statut des personnes considérées comme juives, les conditions de la déportation et surtout l?un des volets de la spoliation, l?Opération Meuble, jamais décrite auparavant.

Placée sous l?égide d?un service coiffé par Rosenberg, celle-ci visait à vider tous les appartements juifs inoccupés et à expédier en Allemagne leur contenu, des meubles les plus massifs aux objets quotidiens les plus anodins. Cette vaste opération de pillage mobilisa les entreprises de déménagement françaises et pas moins de 627 trains.

Ces camps, annexes de Drancy, virent passer au moins 800 détenus juifs. Austerlitz, non loin de la gare, était installé dans un entrepôt des Magasins généraux et compta jusqu?à 600 prisonniers. Lévitan occupait un magasin de meubles, rue du Faubourg-Saint-Martin. Quant à Bassano, il bénéficiait du décor raffiné de l?ex-hôtel particulier des Cahen d?Anvers, au coin de l?avenue d?Iéna. Les prisonniers étaient soumis à un véritable travail forcé pour trier, classer, réparer et emballer meubles et objets. Certains manipulèrent le contenu de leur propre appartement ou celui de leurs proches. Ils vivaient sous la menace d?être envoyés « à l?est » et beaucoup furent bel et bien déportés dont, en juillet 1944, les femmes de prisonniers, vers Bergen-Belsen.

Il est indispensable de s?interroger sur les silences de la mémoire autour des camps parisiens et de l?Opération Meuble. Certains anciens détenus se sont constitués en amicale, demandant que leur histoire soit enfin écrite. Une série d?entretiens avec eux, avec d?autres survivants et avec des témoins a été menée. Une recherche intensive dans une dizaine de centres d?archives a permis de trouver des dossiers jamais consultés sur les camps parisiens. Ce travail, résultat et d?une longue enquête et d?une réflexion sur ce qui constitue la mémoire d?une période, apporte une pierre nouvelle à l?historiographie de Vichy.