Abélard et Héloïse seraient le couple jumeau de Tristan et Yseult, incarnant l'idéal de l'amour en Occident ? Malheureusement, le mythe des amants unis jusqu'à la mort est contredit par la version très prosaïque qu'en donne lui-même Abélard (1079-1162) dans cette longue lettre. Il s'y montre jeune dialecticien orgueilleux, avide d'asseoir sa supériorité intellectuelle et d'acquérir une position bien en vue. Le mufle avoue avoir été prêt à tout pour séduire la belle Héloïse, alors qu'il n'envisageait que sa carrière de philosophe, et non le mariage. De ses malheurs, le plus grand n'est pas celui que l'on croit : ce n'est pas tant son émasculation que la condamnation par l'Église à brûler son ouvrage De l'Unité et de la Trinité divine qui le fait souffrir...