On a beaucoup brodé et peu écrit sur Marie Desmares, dite la Champmeslé, la grande tragédienne française. Cette Rouennaise qui se maria à quinze ans et se remaria à vingt-quatre à un comédien bon vivant, Charles Chevillet sieur de Champmeslé, interpréta aux côtés de son mari tous les seconds rôles féminins, dans la troupe de François Serdin. Elle connut son premier succès sur la scène du Marais, en 1670, en interprétant Vénus dans Les Amours de Vénus et d?Adonis, une tragédie de Donneau de Visé. Mais c?est à l?Hôtel de Bourgogne qu?elle s?affranchit de son époux et supplanta ses rivales, en interprétant, entre autres, tous les grands rôles du théâtre racinien : Bérénice, Iphigénie, Phèdre.
Maîtresse de Racine ? une liaison qui dura sept ans ? en même temps que de Charles de Sévigné et d?autres gentilshommes, elle fait languir son ami La Fontaine, pendant que son mari s?octroye les mêmes plaisirs avec des femmes de moins bonne extraction sociale. Ce couple de comédiens débauchés qui ne se sépara jamais, gagna beaucoup d?argent et n?eut jamais d?enfants. La Champmeslé mourut le 15 mai 1698, renonçant à son métier et à son passé pour gagner la paix de l?Eglise.
Avec en arrière-fond la rivalité Corneille-Racine, la mort de Molière, la concurrence entre l?Hôtel du Marais et l?Hôtel de Bourgogne, Alain Couprie, professeur d?Université (Paris XII), raconte avec brio et légèreté la carrière d?une grande tragédienne française, dotée d?une voix exceptionnelle, qui subjugua Lully et son public.