De Charles VIII à Louis XVI, les chasses aristocratiques ont été associées à un style de vie et à un style de pouvoir. Faucons jetés sur leur proie, meutes excitées par les trompes, cavalcades à travers les bois de Chambord ou de Versailles, autant d'images qui évoquent un temps où les chasses royales prenaient les allures d'une démonstration politique. Cette liturgie spectaculaire remonte au XIVe siècle, quand la chasse fut interdite à la majorité des roturiers. Toutefois, ce n'est qu'à partir des guerres de Religion que le cérémonial se fait plus contraignant, tandis que l'absolutisme se renforce.
Chasser est alors un privilège, mais ce privilège oblige, car il s'appuie sur des hiérarchies que la noblesse proclame inscrites dans la nature. Au fil des siècles, les règles du " noble déduit " se multiplient, précisées par les traités qui définissent aussi bien le gibier digne ou non d'être chassé que les façons de poursuivre l'animal. La chasse devient confrontation réglée avec la sauvagerie, mise à l'épreuve, individuelle et collective, et les rites qui l'entourent une forme d'éducation où le jeune noble apprend à donner à ses pairs les preuves de son identité.
Or les chasseurs d'Ancien Régime, en déjouant les ruses du gibier, n'apprenaient-ils pas aussi à se déjouer des rôles que la société leur assignait? La chasse sous l'Ancien Régime ne peut être réduite à un code strict. Fauconniers et veneurs mais aussi braconniers de ces trois siècles ne partageaient-ils pas la même passion? Leurs plaisirs sont encore en partie les nôtres.
Philippe Salvadori, ancien élève de l'Ecole normale supérieure, est maître de conférences à l'Université de Bourgogne.
Chasser est alors un privilège, mais ce privilège oblige, car il s'appuie sur des hiérarchies que la noblesse proclame inscrites dans la nature. Au fil des siècles, les règles du " noble déduit " se multiplient, précisées par les traités qui définissent aussi bien le gibier digne ou non d'être chassé que les façons de poursuivre l'animal. La chasse devient confrontation réglée avec la sauvagerie, mise à l'épreuve, individuelle et collective, et les rites qui l'entourent une forme d'éducation où le jeune noble apprend à donner à ses pairs les preuves de son identité.
Or les chasseurs d'Ancien Régime, en déjouant les ruses du gibier, n'apprenaient-ils pas aussi à se déjouer des rôles que la société leur assignait? La chasse sous l'Ancien Régime ne peut être réduite à un code strict. Fauconniers et veneurs mais aussi braconniers de ces trois siècles ne partageaient-ils pas la même passion? Leurs plaisirs sont encore en partie les nôtres.
Philippe Salvadori, ancien élève de l'Ecole normale supérieure, est maître de conférences à l'Université de Bourgogne.