A l’heure où la loi Marthe Richard faisait fermer les maisons closes de métropole, l’état-major de l’armée française en Indochine autorisait et même encourageait la création de bordels militaires de campagne à travers tout le territoire dont il avait la charge. Principal motif invoqué ? La lutte, à l’aide d’un encadrement sanitaire adéquat, contre les maladies vénériennes.
Souvent évoqué de façon plutôt allusive, ce phénomène n’avait jamais fait l’objet d’une étude approfondie. Documents officiels (à l’époque classés « confidentiel »), correspondances de soldats et témoignages de vétérans ont permis à Jean-Marc Binot d’en révéler l’ampleur et d’en examiner le fonctionnement. Des méthodes de recrutement à l’établissement des horaires d’ouverture, l’armée n’y perd rien de sa proverbiale rigueur…
Mais encore fallait-il s’intéresser aux prostituées elles-mêmes, à leurs origines et à la détresse matérielle et morale qui leur a fait prendre le chemin de ces établissements pas comme les autres. S’il est vrai, comme le prétendent certains, que ces Marie-Madeleine se sont improvisées infirmières au plus fort des combats et y ont gagné le surnom d’« anges de Diên Biên Phu », sans doute méritaient- elles que l’histoire leur fasse une place.