Le nouveau corps confie au sport son souffle, son cœur, sa sueur et sa fatigue, ne travaille presque plus de force mais sur des codes ; hygiénique, hydraté, sanitaire et aseptique, rectifié par les remèdes et la prédiction médicale, il repousse la mort de trente ans et l’antique souffrance quasi définitivement.
Comment ces corps si vite changés en moins d’un demi-siècle habiteraient-ils le même monde, sentiraient-ils par les mêmes sens, logeraient-ils la même âme que l’ancienne chair accablée ou repue, verbeuse, rigide et trop vêtue en raison de la honte ou du froid, soumise au labeur et non à l’exercice, à la morale plus qu’à la médecine, dont la philosophie de nos pères a parlé ?
Une étude originale et brillante de la situation des corps humains et de leurs sens dans les sociétés contemporaines qui ouvre la voie d’une magistrale philosophie de la sensation, au cœur de la pensée de Michel Serres.
Michel Serres (1930-2019), membre de l’Académie française et professeur à la Stanford University aux ÉtatsUnis, est l’auteur de nombreux essais philosophiques et d’histoire des sciences. Il a notamment publié Petite Poucette (Le Pommier, 2012) et, dans la collection « Pluriel », Le Parasite, Rome et Relire le relié.