L’Italie la nuit restitue les voix et les jours d’une poignée d’habitants du Sud italien, des gens de peu que ces dernières années ont à peine enrichis. Ils habitent la région la plus solaire de la Péninsule, les Pouilles, où pourtant l’ombre du passé, de la dernière guerre comme des années de plomb, s’allonge plus qu’ailleurs. Mais ils voudraient tellement sortir de la nuit de leurs origines, être enfin modernes, présentables. Leurs voix, recueillies par Giovan, celui qui s’est exilé en France, causent enfance, politique, repas. Derrière les politesses fraîchement apprises, les titres ronflants dont ils se gratifient, grondent encore les anciennes violences, les ruses, les vices archaïques. Et puis, entre hommes, ils parlent femmes: parce que Beppé a bien le droit d’aimer la belle Dottoressa à condition qu’il le raconte par le menu et le mot juste aux clients du bar Fidori. Ses mots, précisément, l’auteur les puise dans une nuit qui semble précéder les aubes française et italienne, comme à la recherche de ce qui fut, ou aurait pu être, la langue mêlée des deux sœurs latines. Une langue réinventée, originale et neuve.
De Château perdu, qui se déroulait dans les Pouilles, à Stalag, Jean Védrines est l’auteur de trois romans, salués pour leur créativité langagière, et d’un livre d’entretiens avec Michel Chaillou, L’écoute intérieure.