Issues d'une même construction territoriale _ l'empire carolingien _, la " France " et l'" Allemagne " en sont venues un jour à se constituer en entités politiques autonomes. Comment les Francs, présents sur les deux rives du Rhin, sont-ils, après avoir exercé leur domination sur des peuples aussi divers que les Aquitains et les Saxons, les Bavarois et les Gascons, devenus les uns des " Français ", les autres des " Allemands ", séparés par des frontières politiques, par le barrage des langues et plus tard par le " sentiment national "? Ce long processus s'est amorcé au milieu du IXe siècle au moins et s'est poursuivi jusque vers les années 1050.
Pour en cerner l'émergence et la progression, il fallait repasser au crible l'ensemble des sources disponibles et y examiner les événements politiques, les structures d'encadrement et les relations entre entités détachées du grand Regnum Francorum depuis sa partition en 843 jusqu'au moment où l'on a le sentiment que deux nations distinctes suivent chacune un chemin propre.
Mais, pour écarter les risques de contresens, il était d'abord nécessaire de faire table rase des mythes nationalistes, de se défier des traditions historiographiques, des clichés de la propagande belliciste et des appellations reçues, en bref d'introduire un doute méthodique sur toutes les expressions consacrées par l'usage et d'enquêter sur leur fixation. Ce qui n'était à l'origine que précaution intellectuelle est devenu une recherche en soi, l'examen rigoureux des terminologies menant à l'histoire des idéologies. Carlrichard Brühl démonte ainsi la lente construction savante qui, du XVe siècle à la première moitié du XXe siècle, a vu enrôler Charlemagne comme " roi allemand " et Charles le Chauve comme " roi français ", Arminius et Vercingétorix comme héros respectivement " allemand " et " français ". Qu'est-ce qu'un Gaulois pour un lettré du XIIe siècle ou un humaniste allemand; quel est le sens précis du terme " franc "? Quand les adjectifs " français ", " allemand ", " teuton ", " tudesque ", apparaissent-ils; qu'est-ce qu'un " royaume " au haut Moyen Age? Autant de questions _ capitales _ que des siècles d'hostilité ont privées de réponses et qui sont ici résolues.
Le présent livre a d'abord été publié en allemand en 1990 sous une forme très volumineuse. L'édition française, établie par Olivier Guyotjeannin en étroite collaboration avec l'auteur, est pourvue d'une information bibliographique mise à jour et conserve du très lourd apparat critique de sa première version tout ce qui a une utilité directe pour la lecture (les textes latins indispensables ont été traduits, les références allégées, les excursus abrégés ou intégrés au fil des démonstrations).
Carlrichard Brühl, membre associé de l'académie des Inscriptions et Belles-Lettres, est l'un des plus éminents médiévistes allemands contemporains. Président de la Commission internationale de diplomatique, il a particulièrement oeuvré dans le domaine de l'étude, de la critique et de l'édition des actes souverains médiévaux. Ses contributions majeures ont porté sur le pouvoir royal/impérial du VIe au XIe siècle dans trois pays dont il connaît remarquablement la langue et la culture: l'Allemagne, bien sûr, mais aussi l'Italie et la France. Naissance de deux peuples se situe au confluent des curiosités de l'historien et des interrogations d'un fervent citoyen de l'Europe.
Pour en cerner l'émergence et la progression, il fallait repasser au crible l'ensemble des sources disponibles et y examiner les événements politiques, les structures d'encadrement et les relations entre entités détachées du grand Regnum Francorum depuis sa partition en 843 jusqu'au moment où l'on a le sentiment que deux nations distinctes suivent chacune un chemin propre.
Mais, pour écarter les risques de contresens, il était d'abord nécessaire de faire table rase des mythes nationalistes, de se défier des traditions historiographiques, des clichés de la propagande belliciste et des appellations reçues, en bref d'introduire un doute méthodique sur toutes les expressions consacrées par l'usage et d'enquêter sur leur fixation. Ce qui n'était à l'origine que précaution intellectuelle est devenu une recherche en soi, l'examen rigoureux des terminologies menant à l'histoire des idéologies. Carlrichard Brühl démonte ainsi la lente construction savante qui, du XVe siècle à la première moitié du XXe siècle, a vu enrôler Charlemagne comme " roi allemand " et Charles le Chauve comme " roi français ", Arminius et Vercingétorix comme héros respectivement " allemand " et " français ". Qu'est-ce qu'un Gaulois pour un lettré du XIIe siècle ou un humaniste allemand; quel est le sens précis du terme " franc "? Quand les adjectifs " français ", " allemand ", " teuton ", " tudesque ", apparaissent-ils; qu'est-ce qu'un " royaume " au haut Moyen Age? Autant de questions _ capitales _ que des siècles d'hostilité ont privées de réponses et qui sont ici résolues.
Le présent livre a d'abord été publié en allemand en 1990 sous une forme très volumineuse. L'édition française, établie par Olivier Guyotjeannin en étroite collaboration avec l'auteur, est pourvue d'une information bibliographique mise à jour et conserve du très lourd apparat critique de sa première version tout ce qui a une utilité directe pour la lecture (les textes latins indispensables ont été traduits, les références allégées, les excursus abrégés ou intégrés au fil des démonstrations).
Carlrichard Brühl, membre associé de l'académie des Inscriptions et Belles-Lettres, est l'un des plus éminents médiévistes allemands contemporains. Président de la Commission internationale de diplomatique, il a particulièrement oeuvré dans le domaine de l'étude, de la critique et de l'édition des actes souverains médiévaux. Ses contributions majeures ont porté sur le pouvoir royal/impérial du VIe au XIe siècle dans trois pays dont il connaît remarquablement la langue et la culture: l'Allemagne, bien sûr, mais aussi l'Italie et la France. Naissance de deux peuples se situe au confluent des curiosités de l'historien et des interrogations d'un fervent citoyen de l'Europe.