L'écriture de l'histoire est un très ancien souci des hommes, à la recherche de leur passé pour mieux comprendre le présent. Ecrire l'histoire de son église, surtout quand l'historien est un prêtre _ dont la fonction liturgique essentielle est de " faire mémoire " _ implique passion sans doute, mais aussi méthode.
Au milieu d'un Xe siècle trop souvent présenté depuis la Rennaissance comme un " siècle de fer ", voici qu'après avoir appris son métier en consignant avec précision des Annales et en composant une grandiose épopée du christianisme (Les Triomphes du Christ), le chanoine Flodoard rédige une Histoire de l'Eglise de Reims, depuis ses origines romaines jusqu'en 948.
Reims prend ainsi sa place parmi les augustes cités. Elle aurait été fondée par Remus au temps où Romulus fondait Rome. De Rome, elle aurait reçu par saint Pierre lui-même ses premiers évêques. Par saint Remi de le baptême de Clovis, elle a fait entrer le peuple franc dans la grande histoire, la seule qui vaille, celle du christianisme. Pour écrire l'histoire de ces temps mythiques, Flodoard a exploité des classiques païens ou chrétiens comme Tite-Live, César et Orose, mais surtout il s'est fait archéologue: il a interprété les plus anciens monuments de la cité.
Il s'est ensuite installé dans les archives de la cathédrales pour y suivre la constitution du patrimoine ecclésiastique, montrer comment, du VIe au IXe siècle, se sont mises en place les principales institutions, jusqu'à l'archiépiscopact du prestigieux Hinemar (845-882) dont il inventorie la très riche correspondance. A ce moment-là, s'affirme vraiment l'église de Reims dans les faits, tandis que l'Empire carolingien se divise. Par-delà les frontières du partage de Verdun (843), les archevêques de Reims entretiennent un réseau européen de relations qui prolonge le projet impérial des Carolingiens.
Mais l'historien est d'abord homme de son temps. En écrivant cette Histoire, Flodoard portait en lui les questions posées par les troubles de la première moitié du Xe siècle qu'il décrit dans son dernier livre. Il a inscrit ses réponses dans le temps très long d'une histoire plus que millénaire. Il les a inscrites aussi dans les espaces vécus par ses contemporains. La ville de Reims, les biens dépendant de son église, les lieux où ont été portées des reliques de saints rémois et les destinataires de la correspondance des archevêques dessinent des ensembles de lieux qui sont, pour les lecteurs de Flodoard, la garantie de vérité du récit de l'historien.
Michel Sot est professeur d'histoire médiévale à l'université de Paris X.
Au milieu d'un Xe siècle trop souvent présenté depuis la Rennaissance comme un " siècle de fer ", voici qu'après avoir appris son métier en consignant avec précision des Annales et en composant une grandiose épopée du christianisme (Les Triomphes du Christ), le chanoine Flodoard rédige une Histoire de l'Eglise de Reims, depuis ses origines romaines jusqu'en 948.
Reims prend ainsi sa place parmi les augustes cités. Elle aurait été fondée par Remus au temps où Romulus fondait Rome. De Rome, elle aurait reçu par saint Pierre lui-même ses premiers évêques. Par saint Remi de le baptême de Clovis, elle a fait entrer le peuple franc dans la grande histoire, la seule qui vaille, celle du christianisme. Pour écrire l'histoire de ces temps mythiques, Flodoard a exploité des classiques païens ou chrétiens comme Tite-Live, César et Orose, mais surtout il s'est fait archéologue: il a interprété les plus anciens monuments de la cité.
Il s'est ensuite installé dans les archives de la cathédrales pour y suivre la constitution du patrimoine ecclésiastique, montrer comment, du VIe au IXe siècle, se sont mises en place les principales institutions, jusqu'à l'archiépiscopact du prestigieux Hinemar (845-882) dont il inventorie la très riche correspondance. A ce moment-là, s'affirme vraiment l'église de Reims dans les faits, tandis que l'Empire carolingien se divise. Par-delà les frontières du partage de Verdun (843), les archevêques de Reims entretiennent un réseau européen de relations qui prolonge le projet impérial des Carolingiens.
Mais l'historien est d'abord homme de son temps. En écrivant cette Histoire, Flodoard portait en lui les questions posées par les troubles de la première moitié du Xe siècle qu'il décrit dans son dernier livre. Il a inscrit ses réponses dans le temps très long d'une histoire plus que millénaire. Il les a inscrites aussi dans les espaces vécus par ses contemporains. La ville de Reims, les biens dépendant de son église, les lieux où ont été portées des reliques de saints rémois et les destinataires de la correspondance des archevêques dessinent des ensembles de lieux qui sont, pour les lecteurs de Flodoard, la garantie de vérité du récit de l'historien.
Michel Sot est professeur d'histoire médiévale à l'université de Paris X.